Vous trouvez que ce titre fait peur ? Attendez la réponse...
Pourquoi la transition n’est pas pour aujourd'hui (ni pour demain).
Vous l’aurez compris, la transition n’aura pas lieu de sitôt. Qu’elle soit énergétique, économique ou sociale, la transition n’aura probablement pas lieu avant des lustres.
Le masque est tombé, François Hollande mène la même politique que son sinistre prédécesseur. Il va même plus loin dans la rigueur et l’austérité qu’il impose aux Français pour faire payer cette absurde dette.
Pour relancer la sacro-sainte croissance, il n’hésite pas à aller au Japon, vendre une fois encore, les fruits empoisonnés de notre industrie mortifère. Car la France sait si bien vendre la mort, que ce soit sous forme de contrats pour l’armement (4ème vendeur d'armes au monde) ou pour le fatal nucléaire.
Lisez cet article en anglais du Japan Times : Cease promoting nuclear power
Ne rêvez pas.
Ne rêvez pas, non, ne rêvez pas, tout va continuer, voire empirer. Les lobbies industriels ont gagné. Les gaz de schistes seront exploités, les centrales nucléaires vont repartir pour cent ans, les services publics seront vendus au privé pour faire plaisir aux neuneus qui croient à la "concurrence libre et non faussée", le Front National continuera de répandre sa peste brune dans la société et remportera des élections. Les libertés disparaîtront les unes après les autres, sous prétexte d’une illusoire sécurité.
Non, ne rêvez pas, si tout continue ainsi, ce n’est pas une transition qui se profilera à l’horizon, non, ce sera le fatidique effondrement si brillamment étudié par Jared Diamond.
Il semble que le seul fait d’avoir le pouvoir dispense de penser. Je ne parle pas du pouvoir des politiques, mais du vrai pouvoir, celui de l’argent. L’argent donne l’illusion d’avoir du talent. Pourquoi réfléchir à l’avenir, lorsque tout semble pouvoir s’acheter ? Des fortunes colossales se bâtissent, bientôt les compagnies privées pourront même s’offrir les services d’armées privées (Voir l'exemple de Monsanto). Mais là n’est pas le sujet de cet article.
L’objet de Transitio, rappelons-le, c’est d’essayer de comprendre...
Comprendre le pouvoir ?
Pourquoi ne pas lire alors le livre de Noam Chomsky, justement nommé "Comprendre le pouvoir".
Dans son livre "Comprendre le pouvoir", Noam Chomsky explique en effet qui détient vraiment le pouvoir politique et il cite en appui de sa démonstration deux articles révélateurs parus dans la presse économique en 1992 et 1993 :
Je vous propose de lire cet extrait du chapitre 10 de son livre, intitulé ‘‘Le tournant’’, (pages 278 à 280 dans l’édition française chez ‘‘aden’’).
« … immédiatement après les élections de 1992, le Wall Street Journal a publié un article en première page informant ses lecteurs qu’il n’y avait aucune raison de craindre que les soi-disant ‘‘gauchistes’’ entourant Clinton agissent différemment en prenant leurs fonctions. Bien sûr, le milieu des affaires le savait parfaitement, comme vous pouvez le voir en observant les marchés financiers vers la fin de la campagne électorale. Quoi qu’il en soit, le Wall Street Journal expliquait pourquoi, c'est-à-dire que si par accident Clinton ou tout autre candidat essayait bel et bien d’initier un programme de réforme sociale aux Etats-Unis, on y mettrait fin sur le champ. Ils n’ont fait que rappeler l’évidence et donner les chiffres.
Les Etats-Unis sont profondément endettés – en réalité, cela faisait partie de l’ensemble du programme Reagan / Bush : endetter le pays au point que le gouvernement n’ait presque plus aucun moyen de conserver leurs programmes de dépenses sociales. Et le véritable sens de « être endetté », c’est que le Département des Finances a vendu énormément de titres, obligations, etc. – aux investisseurs, qui se les échangent ensuite sur le marché obligataire. D’après le Wall Street Journal, actuellement, environ 150 milliards de dollars sont échangés chaque jour de cette façon uniquement en bons du Trésor. L’article explique ensuite ce que cela signifie : cela signifie que si telle ou telle mesure du gouvernement américain déplaît à la communauté d’investisseurs qui détient ces titres, cette dernière peut très rapidement vendre une toute petite quantité de bons du Trésor en guise de signal, ce qui aurait pour effet immédiat d’augmenter le taux d’intérêt de 1% et d’aggraver le déficit de 20 milliards de dollars en une nuit – autrement dit si Clinton (dans une hypothèse improbable disons) proposait un programme de dépense sociales à 20 milliards de dollars, la communauté internationales des investisseurs pourrait instantanément le transformer en budget de 40 milliards de dollars, rien qu’avec un signal, et toute autre mesure en ce sens serait alors avortée.
De même, un excellent article est paru dans l’Economist de Londres – vous savez, ce journal spécialiste du libre-échange et de l’idéologie populaire – au sujet du fait que les pays de l’Europe de l’Est se sont remis à élire des socialistes et des communistes au pouvoir. Mais le message de fond de l’article, c’était ne vous inquiétez pas, parce que disaient-ils, « la politique du gouvernement restera exactement telle quelle est parce qu’on les tient par les couilles : c’est nous qui contrôlons les monnaies internationales, et nous sommes les seuls à pouvoir leur accorder des prêts, nous pouvons détruire leur économie si ça nous chante, ils ne pourront rien faire. Ils peuvent jouer n’importe quels jeux politiques et même prétendre être en démocratie si ça leur fait plaisir – tout ce qui leur chante – tant que « la politique du gouvernement ne dépend pas des politiques ».
Par le lien suivant, vous trouverez les notes en anglais dans lesquelles figurent les sources :
Je vous conseille également de lire en anglais cette page écrite par Noam Chomsky en 1995 pour Z magazine :
Qu’importe d'ailleurs que vous compreniez !
Peut-être commencez-vous de comprendre en effet où se trouve le vrai pouvoir ? Peut-être comprenez-vous par exemple, pourquoi notre pathétique ancien petit président est allé "donner" une conférence chez Goldman Sachs, allant chercher sa récompense après son tour de piste ?
Mais cela change-t-il vraiment quelque chose que vous compreniez ?
Cela ne nous avance peut-être à rien, en effet de savoir où se trouve le vrai pouvoir. Nous pouvons disserter, gloser, sur la chose publique, rien ne changera. Du moins c’est ce qu’affirmait cyniquement Karl Rove, le sinistre conseiller de Bush, au journaliste américain Ron Suskind durant l’été 2002, lorsqu’il lui disait ceci :
"Nous sommes désormais un empire, et quand nous agissons, nous créons notre propre réalité. Et pendant que vous étudierez cette réalité – de manière judicieuse, sans aucun doute – nous agirons à nouveau, créant d’autres nouvelles réalités, que vous pouvez étudier également, et c’est comme ça que les choses se régleront. Nous sommes les acteurs de l’Histoire… et vous, vous tous, il ne vous restera qu’à tout simplement étudier ce que nous faisons."
Plus d’info sur cette anecdote par les liens suivants :
Et là : Gouverner par le chaos
Que nous reste-t-il ?
Etudier ce qu’ils font, vraiment ? Est-ce là tout ce que nous pouvons faire ?
Dans ce cas, quelle analyse critique pourrions-nous donner par exemple, de la situation des hommes politiques qui représentent "le pouvoir" ?
Ils savent, eux, sans conteste, qui a le vrai pouvoir. Peut-être même que certains ont conscience de la catastrophe vers laquelle nous nous dirigeons. Mais les problèmes sont devenus trop complexes, et surtout, les mâles dominants qui gouvernent nos sociétés de primates sont devenus si absolument puissants, que la nécessité d’évoluer pour survivre ne leur effleure pas l’esprit.
Je vous propose de lire sur mon blog-note cet édifiant extrait d’un livre de Christian Carle intitulé : ''Du risque de fin du monde et de sa dénégation''.
Mais continuons d'étudier "inutilement" encore un peu. Que pourrions-nous dire d’un homme, qui, sachant tout cela, continuerait de tenir un discours suranné et mener une politique d’un autre temps ? Que c’est un hypocrite ?
Mais qu'est-ce qu'un hypocrite ?
L'hypocrisie..
Mon article, qui sera probablement le dernier avant plusieurs semaines (voire plus), se termine donc sur cette question de l’hypocrisie.
Je fais appel à Hannah Arendt pour définir ce qu'est un hypocrite, en vous donnant à lire cet extrait de son livre "De la révolution" qui vient d'être réédité en poche par Gallimard :
"En tant que témoins non de nos intentions mais de notre conduite, nous pouvons être vrais ou faux, et le crime de l’hypocrite, c’est qu’il porte un faux témoignage contre lui-même. Ce qui confère toute sa vraisemblance à l’hypothèse selon laquelle l’hypocrisie serait le pire de tous les vices, c’est que l’intégrité peut réellement exister sous le couvert de tous les vices, sauf de celui-là. Seuls le crime et le criminel, il est vrai, nous confrontent au problème du mal radical ; mais seul l’hypocrite est réellement pourri jusqu’au cœur."
Hannah Arendt « De la révolution ». La question sociale (page 156)
Sur ces paroles terribles, je vous souhaite malgré tout un bel été, avec les gens que vous aimez.
Bertrand Tièche